Version noir et blanc...

"Les mots sont toujours les pires traites, ma douce Lena... Ne dis jamais rien sans y avoir sangé, et mieux, n'écris jamais rien qui pourrait se retourner contre toi... Voilà quelles sont les vérités..."

Drole de lieu pour faire ressrurgir les souvenirs..; Quoique... A vrai dire, peut-on préférer un endroit à un autre pour se rappeler les bras d'un amant que vous avez froidement assassiné pour obtenir un nom au milieu d'un flot d'apprentissage? Le fin fond de l'enfer, à la limite... Mais une école, entourée de pauvres gamins sans pouvoir... N'est-ce pas pire que l'enfer?

"Tu n'es jamais contente ma Belle..."

Oui, voilà sans doute ce qu'aurait dit ce crétin, s'il avait pu entendre le fin fond de ses pensées... Il aurait haussé les épaules, se serait encore gaussé de moi, et aurait fini par m'attirer tout contre lui afin d'échanger encore un rien de ma tendresse contre un rien de pouvoir...

Soit, tout cela appartenait au passé, il vallait mieux le laisser là où il était... Il avait servi, et mintant, force était de constater que Lena se retrouvait dans un nouveau cadre, pas forcément accordé à la mesure de ses talents... Mais elle saurait s'y faire... Elle apprenait vite... Il parait.

Donc une forêt, une lisière, un rien de danger, une jolie robe noire, les cheveux qui flottent au vent, un visage de poupée et un poignard à votre taille. Un, deux, trois pas..; des branches qui crquent... Et voilà, on respire, la vie est devant vous

Lena avait senti la présence de l'autre, bien avant même de pouvoir l'apercevoir avec le sens de ses yeux. Cela était naturellement due à ses dons, quelque peu inquiétants, mais aussi et surtout, parce qu'elle connaissait déjà Héléna de longue date, et que de là, l'aura de sa présence la berçait plus tendrement que les crocs des fauves sur sa nuque...

Elles avaient tué ensemble par le passé, commis nombres d'actions que l'on disait épouvantables, et qu'elle-même avait commis de plein sang-froid. Mais cet homme-là, qu'elle avait tué avec son détachement habituel et peut-être un rien de cruauté, n'avait-il pas cru pouvoir se moquer des deux jeunes femmes? Lena lui avait appris le sens du mot "vérité"...

"Sont-ce des siècles qui se sont écoulés depuis notre dernière rencontre Héléna? Des siècles ou simplement quelques années?"

Et se retournant avec lenteur, un sourire carnassier aux lèvres, la jeune fille opposa à sa compagne de longue date une expression des plus mystérieuse, entremêlée d'une joie glacée et d'une sauvagerie bestiales...

Lena laissait l'autre parler sans véritablement écouter. Comme toujours entre elle, le contact se faisait plus dans leurs eptits gestes, une moue de mépris, un signe de la tête, une ondulation du poignet, un rien de sourire... Mais pas les mots. Surtout pas ces mots qu'elle méprisait, et encore moins ces banalités sans intérêt qu'elles échangeaient à l'instant présent...
Non, tout était beaucoup plus complexe, et la jeune fille n'était pas du genre à attendre des heures avant de connaître le comment du pourquoi.

De là, Lena eut un petit claquement sec de la langue pour signifier son impatience, et coupant les dernières paroles d'Hélèna, elle n'attendit guère davantage pour l'interroger de façon plus directe:

"Il y a, je suppose, une raison, à notre présence commune en ces lieux... Tu sais très bien ce que je cherche. J'avoue en revanche que je ne comprends pas ce que tu fais dans cette pathétique école de magie."

Froide, cassante, et claire. Lena dans toute sa splendeur...